Marcel avant Duchamp



Extrait d’un article de Vanessa Schmitz-Grucker reproduit avec l’aimable autorisation de ©revuedada
Retrouvez les illustrations de l’article sur http://revuedada.fr/catalogue/duchamp/


Des ready-mades, encore et toujours ! Voilà ce que l’on retient de l’œuvre Marcel Duchamp. Mais savez-vous qu’il aurait pu devenir un grand dessinateur et peintre moderne ? Car il lui a fallu durement travailler avant de trouver sa voie et devenir Duchamp.



Une histoire de famille



L’histoire de Duchamp est avant tout une histoire de famille. À Blainville, le grand-père, Emile Frédéric Nicolle est un artiste-peintre reconnu. Il a sans nul doute influencé la carrière de ses quatre petits-enfants : Marcel, Gaston, Raymond et Suzanne deviendront tous artistes ! Le jeune Marcel a bénéficié d’une solide formation artistique, à commencer par la gravure et le dessin. Avant les prix et les écoles, c’est son grand-père qui le prend en apprentissage dans son atelier. Il n’a pas suivi de parcours classique : durant sa jeunesse en Normandie, c’est en famille puis au lycée, qu’il découvre l’art. Mais alors que ses frères et sœurs suivent une vois plus conventionnelle, que s’est-il passé pour que Marcel troque son tablier de graveur accompli, employé chez un imprimeur à Rouen, contre la tenue d’artiste provocateur ?



De Blainville à Paris



Marcel n’est pas devenu Duchamp en un jour ! Il a longtemps hésité : peintre ? graveur ? illustrateur ? Les perspectives sont nombreuses. À 15 ans, on lui reconnaît déjà de grandes qualités graphiques. Il n’y a qu’à regarder le portrait de sa sœur Suzanne, une gravure datée de 1904. Quel réalisme époustouflant pour un jeune homme de 17 ans. Observez pourtant ce trait nerveux : Duchamp ne sera certainement pas un artiste académique. Mais pour l’heure, il est encore un jeune adolescent normand qui obtient son baccalauréat avec la médaille d’excellence pour le dessin. C’est du sérieux ! Le jeune Marcel a déjà une bonne maîtrise des techniques artistiques, tout autant que celle du billard, qu’il va assidûment pratiquer à Paris.



Croquis exquis



Dans la capitale, il retrouve son frère Gaston, maintenant connu sous le nom de Jacques Villon. Il est, lui aussi, un graveur d’exception. Mais en bon Duchamp, il a également de multiples talents. Jacques Villon est réputé dans le milieu parisien pour ses caricatures publiés dans divers journaux satiriques. Il aidera son jeune frère à se perfectionner. Marcel s’adonne alors, sans limites et avec passion, au dessin.
Il suit même des cours à l’Académie Julian, où la pratique du croquis est obligatoire. Il ne quittera plus son carnet. Tous les jours, il croque des personnages : un paysan, un homme assis, un employé de pompes funèbres ou bien encore ce réserviste. En quelques coups de fusain, on ressent la lassitude de cet homme promis à la guerre. Le dessin n’est pas académique : Marcel dessine comme tous ces artistes modernes qui vont marquer le XXe siècle, sans savoir qu’il deviendra l’un d’eux. Il espère plutôt décrocher de grandes commandes comme illustrateur ou dessinateur, afin de vivre de son art. […]



Duchamp impressionniste



Duchamp hésite toujours quant à son avenir. L’héritage de son grand-père est encore très présent ; en témoigne la rétrospective que sa descendance organise en 1908 au musée des Beaux-Arts de Rouen. L’artiste saisit cette occasion pour exposer deux toiles et avouer son admiration pour Claude Monet. En 1902, il avait, en effet, réalisé une vue de l’église de Blainville dans un style très vaporeux. […]



Et Duchamp fût…



Finalement, Marcel Duchamp abandonne la couleur au profit des formes anguleuses et géométriques du cubisme. […] C’est ainsi qu’il aboutit à la réalisation de son tableau le plus célèbre en 1912, Nu descendant un escalier. […]
Si cette toile est aujourd’hui considérée comme un chef-d’œuvre, elle est à l’époque rejetée par les pairs et amis de Duchamp et refusée au Salon des indépendants ! Marcel, blessé, abandonne alors la peinture pour devenir Duchamp …



Duchamp dans sa ville